THÉÂTRE D'OMBRES ET DE SILHOUETTES

BARBE  BLEUE
Texte de Nicolas AUBERT
libre de droits.

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le petit chaperon rouge - le chat botté - ombres chinoises silhouettes thetre d`ombres

 Planches de SAUSSINE


PERSONNAGES :
NARRATEUR
ANNE
ISABELLE

DEUX FRÈRES, muets
 

TABLEAU  N ° 1

Décor : un extérieur en ville ou à la campagne.

NARRATEUR. - Il était une fois un homme (Barbe Bleue entre sur l'écran et y circule d'un côté à l'autre.) qui avait de belles maisons à la ville comme à la campagne. Il mangeait dans de la vaisselle en or et en argent et il ne se déplaçait que dans des carrosses tout dorés. Chez lui, les meubles étaient en broderie. Cet homme ne semblait n'avoir qu'un seul défaut : il avait la barbe bleue. À l'époque, cette couleur n'était pas encore à la mode et toutes les jeunes filles s'enfuyaient lorsqu'elles voyaient venir cet homme (Barbe Bleue sort, les jeunes filles entrent).

ANNE. - Mais voyons, Isabelle, il est laid comme un pou. Jamais je ne pourrai épouser un tel homme, je suis trop jeune. Toi, tu vas vers tes vingt-et-un ans, tu es bonne à marier. C'est toi qui devras épouser Barbe Bleue.

ISABELLE. - Mais, Anne, ma soeur Anne, tu sais très bien que cet homme a déjà été marié plusieurs fois et qu'on ne sait pas ce que sont devenues ses premières femmes.


ANNE. -  Eh bien, Isabelle, raison de plus pour que ce soit toi qui l'épouses. Moi, je mourrais de peur rien qu'à l'idée de vivre chez lui. Tu sais ce que maman a dit : une d'entre nous doit épouser cet homme pour rembourser les dettes de la famille.

ISABELLE. -
  Anne, ma soeur Anne, je veux bien mais à une condition...

ANNE. - Et qu'elle est cette condition, ma soeur ?

ISABELLE. - Si j'épouse Barbe Bleue, tu viendras vivre avec nous au moins six mois par an tant que tu ne seras pas mariée toi même. C'est ça ou rien.

ANNE. - C'est d'accord, Isabelle, faisons comme ça.

 

TABLEAU  N° 2

(Le cabinet avec la porte fermée est à gauche de l'écran).


 

NARRATEUR. - C'est ainsi que Barbe Bleue se remaria (Barbe Bleue se promène sur l'écran suivi de sa femme.) avec une des deux soeurs. Le premier mois se passa bien puis... (Barbe Bleue se tourne vers sa femme).

BARBE  BLEUE. - Ma chère, je dois partir pour faire un voyage afin de mettre en ordre mes affaires dans une ville lointaine. Je serai parti au moins un mois et demi. Amuse-toi, fais venir ta soeur, tes amies. Invite des musiciens et fais la fête. Mange ce qu'il y a de meilleur, ne bois que des choses délicieuses. Je te donne les clefs de la maison. Celle-ci ouvre mes coffres-forts où il y a de l'or, de l'argent et des pierres précieuses. Celles-là ouvrent toutes les portes du château et de mes garde-meubles. Cette autre ouvre les armoires qui contiennent la vaisselle en or et en argent... (Un silence.) Cette toute petite clef là ouvre la porte du petit cabinet qui est en bas du grand escalier.
     Tu peux aller partout, tu peux tout ouvrir mais, pour ce qui est du petit cabinet qui est en bas du grand escalier, je te défends d'y entrer. Si tu me désobéis, rien ne pourra te faire pardonner, ne l'oublie pas.


ISABELLE. - Ne t'inquiète pas, mon cher mari, tu seras obéi. (Barbe Bleue sort).

NARRATEUR. - Dès que Barbe Bleue eut quitté la maison, sa femme fouilla partout (Elle marche de long en large sur l'écran) : dans les appartements, dans les buffets, dans les armoires, dans toutes les pièces du château... Elle finit par arriver devant le petit cabinet qui est en bas du grand escalier (Le narrateur parle très lentement). Elle sortit la toute petite clef de sa poche et elle ouvrit la porte (Ouvrir la porte du cabinet. On aperçoit les femmes de Barbe Bleue).
 

ISABELLE. - Quoi ? Quelle horreur ! Les premières femmes de mon mari sont là. Il y a du sang partout. Ah, non, j'ai fait tomber la clef ! Oh, elle est pleine de sang. Il faut que je la lave. Quoi ? Le sang ne part pas ? La clef est magique ? Non, pitié, pas ça ! (Barbe Bleue entre derrière elle, il tient son grand couteau. Fermer et retirer le petit cabinet). Fermons la porte de ce petit cabinet...

BARBE  BLEUE. - Ah ! Ah ! Ma femme, j'ai pu rentrer plus tôt que prévu. Rends-moi les clefs de la maison, s'il te plaît.

ISABELLE, tremblant. - Les voici, mon cher mari
 

BARBE  BLEUE. - Pourquoi la clef du petit cabinet qui est en bas du grand escalier n'est-elle pas avec les autres ?

ISABELLE, tremblant. - Co... co... comment ? Elle n'est pas avec les autres, tu es sûr ?

BARBE  BLEUE. - Non, elle n'y est pas et tu le sais très bien. Donne-moi cette clef tout de suite.

ISABELLE. - Ou... ou... oui, je vais la chercher.

BARBE  BLEUE. -  Non, elle est là, avec toi. Je le sais.

ISABELLE. - Mais.... D'accord... la voici (On remplace par l'ombre d'Isabelle debout par celle où elle est à genoux).

BARBE  BLEUE. - Pourquoi y a-t-il du sang sur cette clef, dis-moi ?

ISABELLE. - Je... je... je n'en sais rien.

BARBE  BLEUE. - Ah ! Tu n'en sais rien !? Eh bien moi, je sais. Tu es entrée dans le petit cabinet qui est en bas du grand escalier, tu as ouvert la porte... tu m'as désobéi.

ISABELLE. - Pitié, mon cher mari, pitié.

BARBE  BLEUE. - Non, je n'aurai aucune pitié. Tu vas rejoindre mes premières femmes dans le petit cabinet qui est en bas du grand escalier. Prépare-toi à mourir.

ISABELLE. - Non, non... pitié.

BARBE  BLEUE. - Non, ma femme, je t'avais avertie. Il te faut mourir... ici... maintenant.

ISABELLE. - Alors, si je dois vraiment quitter la vie, laissez-moi au moins faire une dernière prière.

BARBE  BLEUE. - Je te laisse un quart d'heure pour faire ta prière, pas une minute de plus. Après, je reviendrai. Je vais aiguiser mon grand couteau (Il sort).

 

TABLEAU  N° 3
     

 

     (placer le décor de la tour sur un côté du Castelet. Soeur Anne sera placée dessus).
     (Soeur Anne entre et s'approche de sa sœur).

     

FEMME  DE  BARBE  BLEUE. - Mon mari veut me tuer car je lui ai désobéi. Je t'en prie, monte sur le haut de la tour pour voir si nos frères n'arrivent pas. Ils doivent venir d'un moment à l'autre. Si tu les vois, dis-leur de faire vite.

     (Anne sort de l'écran et entre sur la tour. Elle regardera vers l'extérieur de l'écran).


ANNE. - Ca y est, Isabelle, je suis en place.

ISABELLE. - Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?

ANNE. - Non, ma soeur, je ne vois rien venir. Je ne vois rien que le soleil qui poudroie et l'herbe qui verdoie.
 

BARBE  BLEUE, voix off. - Ça y est, ma femme, je peux venir ? Tu es prête à mourir ?

ISABELLE. - Non, mon mari, je n'ai pas encore tout à fait fini. Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?

ANNE. - Non, ma soeur, je ne vois rien venir. Je ne vois rien que le soleil qui poudroie et l'herbe qui verdoie.

BARBE  BLEUE. - Femme, ma patience a des limites ! Descends ici tout de suite ou je monterai te chercher.

ISABELLE. - J'ai presque fini. Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?

SOEUR  ANNE. - Je vois de la poussière à l'horizon.

ISABELLE. - Ce sont nos frères ?

ANNE. - Non, c'est un troupeau de moutons.

B
ARBE  BLEUE. - Femme, as-tu fini ? Ça suffit ! Le quart d'heure est passé.

ISABELLE. - Encore quelques secondes. Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?

ANNE. - Je vois deux cavaliers qui viennent par ici. Qu'ils sont loin. Hourra, ce sont nos frères. Je leur fais signe d'aller plus vite.

BARBE  BLEUE. - Tu te moques de moi. J'arrive. (Il arrive devant sa femme qui est à genoux, il lève son couteau).


ISABELLE. - Pitié, mon mari, pitié.

BARBE  BLEUE. - Non, tu n'as pas droit à ma pitié.

     (Les deux frères se précipitent par le bas de la tour. Barbe Bleue essaie de s'enfuir. Ils le rattrapent et le transpercent de leurs épées.) 
 

ISABELLE. - Anne, ma soeur Anne, où es-tu ?

ANNE, accourant. - Je suis là, ma soeur, tout va bien se passer maintenant.

     (Les personnages quittent l'écran.)

 NARRATEUR. - La femme de Barbe Bleue se remit de toutes ses émotions et trouva un mari gentil et travailleur avec lequel elle vécut heureuse entourée de ses enfants.
 

FIN
 


EN  PLUS...
 

     Cette version de Barbe Bleue a été écrite pour être jouée avec les ombres données sur la planche de Saussine. Comme cela peut sembler limité, voici des silhouettes permettant de jouer un bal (pour le mariage, pour la fin de l'histoire...). On pourrait ajouter des ombres pour un festin.
     Cela permettrait d'ajouter un défilé dans la saynète et, par là-même, d'en faire une véritable pièce d'ombres. Tout ajout, suppression, changement, du texte présenté ici sont tout à fait autorisés.

 


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