THÉÂTRE D'OMBRES ET DE SILHOUETTES

 
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LE MOUTON
Bê  !

LE VEAU
Meuh !

LE GENDARME
Crr  ! Je crois qu'on soupire ?

LE MOUTON ET LE VEAU
On nous fait mal ; tu nous fais pire.

LE GENDARME
Puisqu'on a violé la Loi
Je dois coffrer ; c'est mon emploi.

LE MOUTON
Bê ! bê ! bê ! La loi violée,
Le fut sur ma toison volée.

LE VEAU
Meuh ! meuh ! Moi, ce fut sur mon cuir.

LE GENDARME
N'essayez pas de vous enfuir
Par des astuces que je flaire !
Vous êtes pris, l'affaire est claire.
Tout le reste, il est d'allemand
Pour m'engluer, subséquemment.

SA CONSCIENCE
Gendarme, gendarme, prends garde !
La dame blanche te regarde,
Et la dame blanche, c'est moi.

LE GENDARME

Nonobstant que je sens d'émoi.
 

SA CONSCIENCE
Songe quelle source de larmes
Pour l'honneur du corps des gendarmes,
Si tu pinçais deux innocents !

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LE MOUTON
Bê ! bê !

LE VEAU
Meuh ! meuh !

LE GENDARME
À leurs accents
Je vois que c'est moi qui se trompe.
Suffit ! Je m'ai trompé. Qu'on rompe !
Tout s'éclaire en interrogeant.
Le gendarme est intelligent.
(Il s'éloigne).

LE MOUTON, le poursuivant.
Bê ! bê  ! bê ! bê !

LE GENDARME
Quelle pécore !

LE VEAU, lui barrant la route.
Meuh ! meuh !

LE GENDARME
Que voulez-vous encore ?

LE MOUTON, devenant spectral.
Que tu le mènes en prison,
Celui qui vola ma toison.

LE VEAU, devenant fantasmatique.
Et dans un cul de basse-fosse,
Celui qui de mon cuir se chausse.

LE GENDARME, terrifié.
Où donc est-il ?

LE MOUTON ET LE VEAU, sarcastiques.
Pas loin d'ici.

LE VEAU
Dans tes bottes regardes-y !

LE MOUTON
De lui, ta tunique en est pleine.

LE GENDARME, affolé.
Comment  ? Que dites-vous  ?
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LE MOUTON
Ma laine,
Ma laine de pauvre mouton,
On en a fait du molleton
Pour ta tunique et tes culottes.

LE VEAU
Ma peau, c'est le cuir de tes bottes.

LE MOUTON
Mon poil feutré, c'est ton chapeau.

LE VEAU
Et ton baudrier, c'est ma peau.

ENSEMBLE
Et nous crierons à perdre haleine :

LE VEAU
Rends-moi ma peau !

LE MOUTON
Rends-moi ma laine !

LE VEAU
Voleur !

LE MOUTON
Voleur !

ENSEMBLE
Voleur ! Voleur !

LE GENDARME, fermant les yeux.
Mais c'est mon bien !

SA CONSCIENCE, les lui ouvrant.
Non, c'est le leur.
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  SCÈNE V

Dans l'âme du gendarme.

LE GENDARME
Ô Loi, pardonne à ton gendarme
Qui te violait censément
Sans le savoir, mais qui ne ment
Pour rien au monde à son serment.
Du moment qu'on sonne l'alarme
À mon pervers aveuglement,
Je me soumets, et sans vacarme
Je vais dans son casernement
Le ramener, le garnement
Qui se conduisait comme un carme
Envers toi, quoique en t'estimant.
Ô Loi, mère du règlement,
J'aurai du moins goûté le charme
D'agir procès-verbalement.
Mais d'abord, et premièrement,
Rendons ces objets d'agrément,
Le bien d'autrui, m'y conformant.
Je verserai plus d'une larme,
Certes à quitter mon fourniment.
Toutefois, me reste mon arme ;
Et c'est, d'après mon sentiment,
Assez pour faire un bon gendarme.

SA CONSCIENCE
Nonobstant et subséquemment.
SCÈNE VI

Apothéose.

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