SEPTIÈME TABLEAU : LE DÉSESPOIR
NARRATEUR. - La convalescence a été longue, fort longue et en attendant des jours meilleurs, le pauvre Pierrot, toujours seul, toujours épris, pour occuper sa pensée, en est réduit à arroser son jardin. Il fait pousser des fleurs merveilleuses au parfum sans égal. Colombine arrive et s'approche du buisson multicolore. Elle respire son parfum. La belle ne semble pas intéressée. Pierrot reste là, planté comme un poireau et Colombine s'en va.
Pierrot arrose son jardin.
http://www.alienor.org/collections-des-musees/fiche-objet-7163-ombre-chinoise-pierrot-arrose-son-jardin
(avec l'aimable autorisation de madame le Conservateur des musées de Châtellerault)
Pierrot présente le louis à Colombine.
http://www.alienor.org/collections-des-musees/fiche-objet-7165-ombre-chinoise-pierrot-tend-un-sou
(avec l'aimable autorisation de madame le Conservateur des musées de Châtellerault)
Colombine indifférente.
http://www.alienor.org/collections-des-musees/fiche-objet-7166-ombre-chinoise-colombine-indifferente
(avec l'aimable autorisation de madame le Conservateur des musées de Châtellerault)
RIDEAU
L'âge d'or
symphonie pantomime pour piano à 4 mains
par Claudius Blanc et Léopold Dauphin
d'après un dessin d'Adolphe Willette
PREMIER CAHIER
I. PRÉLUDE-GAVOTTE
II. ANDANTINO : Pierrot amoureux
III. MAZURKA : Pierrot musicien
IV. ANDANTINO : Pierrot poète
V. INTERLUDE : Pierrot peintre
DEUXIÈME CAHIER
VI. SCHERZO : Pierrot furieux
VII. MARCHE-FUNÈBRE : Pierrot désespéré
VIII. PASTORALE : Pierrot jardinier
IX. CARILLON NUPTIAL : Heureux Pierrot
I. PRÉLUDE-GAVOTTE
À travers des bosquets fleuris, sous les clartés lunaires, des Gilles et des Pierrettes, comme en un exquis Watteau, évoluent, avec des mines furtives et lentes.
II. ANDANTINO : Pierrot amoureux
Avec des gestes câlins pleins de douceur, Pierrot mime sa passion naissante. Il s'avance doucement vers Pierrette et, timide, lui raconte son cœur. Pierrette lui tourne le dos et reste impassible.Pierrot tend les bras vers elle et supplie avec force ; il tombe à ses genoux et baise tendrement le bas de sa jupe.
III. MAZURKA : Pierrot musicien
Pierrot, violon en main, vante à Pierrette les qualités et la beauté de l'âme de son instrument. « Pour toi, dit-il, comme un tzigane, j'en jouerai véhémentement, si tu veux, et je te charmerai.
- Me charmer !... répond Pierrette, que nenni ! Fais-moi plutôt danser... » Pierrot joue du violon et Pierrette de danser. Il cesse de jouer. Pierrette, presque ravie, explique à Pierrot toute la joie que lui procure la danse et le prie de recommencer.
« Volontiers, dit-il, mais d'abord, aime-moi !...
- Non !
- Pourquoi non ?...
- Parce que !... » et, rieuse, sans en dire plus long, elle va fuir. Il la retient. Ils se querellent et, comme Pierrette va finalement lui échapper, Pierrot, pour la retenir, reprend son violon et joue de nouveau. Au rythme de la mazurka, Pierrette cède et, dansant, tourne autour de Pierrot dont elle accepte la musique, mais refuse l'amour.
IV. ANDANTINO : Pierrot poète
Pierrot essaie de toucher le cœur de la belle indifférente en improvisant pour elle des strophes ailées qu'il accompagne au son d'une lyre : il chante son amour. À sa voix, un vol de papillons blancs palpite sur son front inspiré ; un serpent charmé se dressé et l'écoute ; de beaux lys éclosent à ses pieds ; des branchages fleuris s'inclinent vers lui : la nature entière s'émeut, sauf Pierrette qui, indifférente, bâille et finalement s'endort sur un banc de gazon. Pierrot, désolé d'une aussi cruelle insensibilité, mouille de larmes les cordes de sa lyre.
V. INTERLUDE : Pierrot peintre
Pierrette, modèle ironiquement remuant et insaisissable, va, vient, sautille, court et danse autour du chevalet, et c'est en vain que, désespéré, Pierrot veut fixer sur sa toile l'image de la chère et cruelle indifférente.
DEUXIÈME CAHIER
VI. SCHERZO : Pierrot furieux
Pierrot, furieux, s'arme d'un plumeau pour en battre coups de manche Pierrette. Il la menace. En colère, il tape du pied, puis, avec insistance, la presse de céder et cherche à l'enlacer, mais, tenace dans son refus, Pierrette lui échappe. Fureur de Pierrot ; il la poursuit, la suppliant et la menaçant tour à tour, tandis que Pierrette, moqueuse et habite à éviter les coups, court devant lui.
« Rends-toi !
- Non !... »
Il la bat à coups redoublés. Pierrette se prend à pleurer et Pierrot aussitôt de s'attendrir. Maintenant pour se faire pardonner ses brutalités, il la caresse avec les plumes de son plumeau ; il veut essuyer ses larmes :
« Prends pitié, chère... pardonne-moi... aime-moi !
- Non, non, non !
- Ah ! C'est ainsi ?... tiens ! Tiens ! »
Et les coups de pleuvoir à nouveau... dans le vide, autour de la maligne et fugace Pierrette.
« Cesse de me désespérer ! » et il tend, suppliant, les bras vers elle. Elle éclate de rire et, rapide, s'enfuit. Il la poursuit et veut la battre encore.Mais épuisé par l'effort, Pierrot tombe anéanti sur le banc de gazon.