TRADITION COMIQUE EN UN TABLEAU
du théâtre Séraphin
domaine public
avec l'aimable autorisation de Christine HERVOUIN,
http://atelier-du-49.over-blog.com/
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Le théâtre représente une rue de Paris :
maisons à droite et à gauche de la scène.
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PERSONNAGES :
MADAME DU PLUMEAU, concierge.
Un marchand de robinets.
TIMBRE - POSTE, facteur.
DUCROCHET, chiffonnier.
NINI, bouquetière.
Un chanteur des rues.
JASMIN, valet de pied.
Un marchand de pommes de terre.
GEORGES, neveu de Mme Du Plumeau.
Un porteur d'eau.
Un repasseur de couteaux.
Un marchand de coco.
Un marchand d'asperges.
Un marchand d'habits.
Un marchand de melons.
Un montreur d'ours.
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JASMIN. - Le poisson d'avril. La lettre que vous avez reçue.
MADAME DU PLUMEAU. - Comment, c'est un poisson d'avril ?
SCÈNE Ière
MADAME DUPLUMEAU, balayant. - Encore un p'tit coup d' balai par ici, et mon ouvrage sera finite. Ma cour est propre comme l'æil. Par exemple, si les coins-n-en-veulent, qu'ils s'approchent. (Elle rit). Hé ! Hé ! Hé ! Faut d' la propreté, pas trop n'en faut ! D'ailleurs, mon propriétaire ne demeure point dans ma maison... je veux dire dans sa maison ; et, quant à mes locataires, s'ils ne sont point satisfaits, je leurs-y dit bien des choses honnêtes.
SCÈNE II
MADAME DUPLUMEAU, UN MARCHAND DE ROBINETS
(Le marchand de robinets souffle dans sa trompette. Pour imiter ce bruit, on soufflera dans un entonnoir ou dans un cornet en carton).
MADAME DUPLUMEAU. - Qu'est-ce que c'est ? Quelle est cette musique ?
LE MARCHAND DE ROBINETS, criant. - V'là l' raccommodeur de fontaines, le poseur de robinets.
MADAME DUPLUMEAU. - Voulez-vous bien vous taire ! Est-ce qu'on fait du bruit comme ça dans une maison tranquille et bien habitée ?
LE MARCHAND DE ROBINETS. - Il faut bien que je me fasse entendre. (Il crie). V'là l'raccommodeur de fontaines, le poseur de robinets.
MADAME DUPLUMEAU. - Voulez-vous bien partir. Tout dort encore dans mon immeuble ; tout sommeille céans.
LE MARCHAND DE ROBINETS. - Suffit, mame Du Balai, on s'en va.
MADAME DUPLUMEAU. - Mame Du Balai ! Insolent ! Apprenez que je me nomme Du Plumeau : Anastasie-Cunégonde Du Plumeau.
LE MARCHAND DE ROBINETS. - Du Plumeau ou Du Balai, ça se ressemble joliment. (Il sort en criant). V'là l' raccommodeur de fontaines.
SCÈNE III
MADAME DU PLUMEAU, puis DUCROCHET
MADAME DU PLUMEAU, avec colère. - Avez-vous vu ce malappris ; m'en voici débarrassée, heureusement.
DUCROCHET. - Madame la concierge, avez-vous eu l'obligeance de me mettre de côté les détritus ? c'est moi, l' papa Ducrochet, un philosophe nocturne, chevalier de la lanterne.
AIR : Qui la vend ? qui la vend ?
Chiffonnier, chiffonnier, brave industriel,
Le ciel gris
De Paris
Est mon septièm' ciel.
la hotte sur le dos
J' parcours chaqu' quartier :
Place au gai chiffonnier!
Couplet
J'ai la flèche en main,
Comme ce gamin
Qui régnait à Cythère.
J' visit' mes Etats,
Cherchant dans les tas
Si je trouve des loqu' à terre!
ENSEMBLE. -
Chiffonnier, chiffonnier, brave industriel,
Le ciel gris
Est mon septièm' ciel.
la hotte sur le dos
J' parcours chaqu' quartier :
Place au gai chiffonnier !
MADAME DU PLUMEAU. - Vous trouverez dans le fond de la cour vos petites détritus.
(Ducrochet sort).
SCÈNE IV
MADAME DU PLUMEAU, TIMBRE - POSTE
MADAME DU PLUMEAU. - Allons savourer mon café-n-au lait avec Moumoute, ma grosse petite chatte.
TIMBRE-POSTE, une lettre à la main. - Mame Du Plumeau, une lettre pour vous.
MADAME DU PLUMEAU. - Pour moi ! Par exemple. Qui est-ce qui peut m'écrire ? Monsieur Timbre-Poste, si vous étiez bien aimable, vous m' la liriez, c'te lettre.
TIMBRE–POSTE. - Volontiers, mais dépêchons : je suis pressé ! (Il lit).
À madame Anastasie-Cunégonde Du Plumeau.
« Madame,
Vous recevrez aujourd'hui la visite d'une personne que vous n'avez pas vue depuis longtemps et que vous chérîtes. »
MADAME DU PLUMEAU. - Hein ! Y a ça ? Quel est donc ce mystère mystérieux ?
TIMBRE-POSTE. - Pas de signature. Je me sauve. (Il sort).
MADAME DU PLUMEAU. - Merci, monsieur Timbre-poste.
SCÈNE V
MADAME DU PLUMEAU, seule. - Je n'en reviens point! Comment-n-aujourd'hui je recevrai la visite d'une personne que je n'ai point vue depuis longtemps et que je chéris jadis... J'allons joliment dévisager tous les ceux et toutes les celles qui viendront-z-ici.
SCÈNE VI.
MADAME DU PLUMEAU, NINI.
NINI, criant. - La violette, elle embaume : fleurissez-vous, en passant.
MADAME DU PLUMEAU, à part. - Voyons d'abord celle-ci. (Haut). Qui êtes-vousbelle jeunesse ?
NINI. - Madame !
Air : Qu'on est heureux d'épouser celle.
Ou : À jeun je suis trop philosophe.
De quatre sœurs je suis l'aînée :
Hélas ! nos parents ne sont plus !
Seule je dois, tout l'année,
Remplacer ceux que j'ai perdus !
Chaque matin, quand vient l'aurore,
Je vais cueillir de fraîches fleurs :
Admirez les présents de Flore
Contemplez leurs vives couleurs.
MADAME DU PLUMEAU. - Je les adore les fleurs : d'abord ça parfume, et puis, ça sent bon tout plein. Vous me donnerez pour deux sous de giroflées.
NINI. - Bien volontiers, madame. Voyez comme elles sont fraîches. Toutes les fleurs symbolisent nos sentiments, nos qualités et nos vertus.
MADAME DU PLUMEAU. - Est-il possible ?