LE BON ROI DABOBERT Texte de Lemercier de Neuville
dessins de Jean Kerhor
1911 - domaine public PERSONNAGES
Le roi Dagobert.
Éloi.
Le Sire de Perchelongue.
Le Vidame de Maltourné.
Inès.
Odette.
Figurants.
DÉCOR :
Trône dressé par Dagobert dans la plaine, à quelque distance de son château que l'on aperçoit au loin. Grande tente abritant le siège royal. COSTUMES
Dagobert, Costume de Roi moyen Age.
Éloi, Longue tunique.
Perchelongue, Pourpoint, haut de chausses, très grand.
Maltourné, Pourpoint, haut de chausses, très petit.
Inès, Costume moyen Age.
Odette, id.
Pages, dames d'honneur, écuyers, en groupes découpés.
LE BON ROI DAGOBERT
PIÈCE EN UN ACTE
PERSONNAGES :
Le roi DAGOBERT.
ÉLOI, son conseiller intime.
Le sire de PERCHELONGUE.
Le vidame de MALTOURNÉ.
INÈS.
ODETTE.
Dames d'honneur.
Pages.
Hommes d'armes,
Valets,
Fauconniers, etc.
SCÈNE PREMIÈRE
Éloi ÉLOI. - Le roi Dagobert est un cachottier. Il ne m'a point dit pourquoi il rassemblait aujourd'hui tous ses vassaux dans son palais ; je suis sûr qu'il va faire des bêtises... et ça retombera sur moi. Le peuple, et quand je dis le peuple, j'entends tous ceux qui n'approchent pas du trône, et le peuple ne se doute pas des dangers que courent les serviteurs immédiats du roi. On s'imagine qu'ils sont influents, ah bien oui ! Tenez, moi, voici trois ans que je demande au roi de vouloir bien augmenter mes appointements, qui sont très minimes. Savez-vous ce qu'il me répond ? Ah ! Ah, mon pauvre Éloi, tu tombes bien mal, ma caisse est à sec, je n'ai pas même le moyen de renouveler ma garde-robe, qui est en loques, et il faut que je représente, d'autant plus que je vais marier mes filles et que les prétendus doivent se présenter aujourd'hui. Tu me comprends, mon vieil Éloi ? Que voulez-vous que je dise à cela ? Mais le voici qui vient avec tout son cortège, allons au devant de lui.
Dagobert et sa suite. On placera Dagobert à gauche, à la fin de la suite. SCÈNE II
ÉLOI, DAGOBERT, Dames d'honneur, Pages,Hommes d'armes, Valets, Fauconniers, etc.
Dagobert DAGOBERT, entrant à la suite de l'escorte. - Ah ! te voilà, Éloi !
ÉLOI - Que désirez-vous, Sire ?
DAGOBERT. - Je voudrais bien savoir, pourquoi l'on dit que toutes ces personnes font partie de ma suite ? Je trouve cette expression malheureuse, puisque cette suite me précède.
ÉLOI. - La remarque est juste, Sire. Mais vous savez que les rois ont des privilèges particuliers, ainsi les suites des rois les précèdent toujours, sauf moi cependant qui suis très honoré de vous suivre.
DAGOBERT. - Très bien ! Très bien répondu ! Mais qu'as-tu ainsi à me considérer par derrière ? Je te permets de me regarder en face.
ÉLOI, embarrassé. - C'est que je m'aperçois que vous n'avez pas observé le cérémonial.
DAGOBERT. - Quel cérémonial ?
ÉLOI. - Je ne sais pas si je vais oser vous dire..
.
DAGOBERT. - Ose donc, Éloi, je puis tout entendre de toi.
ÉLOI. - Eh bien, je vais vous dire cela en vers et en musique.
Air du Roi Dagobert.
Mon bon roi Dagobert,
Votre culotte est à l'envers.
DAGOBERT, chantant également. - Tu railles, je crois ?
ÉLOI. - Non pas, ô mon roi.
Votre Majesté
Est mal culottée.
DAGOBERT. - C'est vrai ! C'est vrai, ma foi,
Je vais la remettre à l'endroit.
ÉLOI. - Oh ! Sire, pas ici ! ce serait inconvenant. Assis sur votre trône, personne ne s'apercevra du désordre de votre toilette. Attendez la fin de la cérémonie.
DAGOBERT, s'asseyant sur son trône. - Tu as raison. Et là-dessus je fais cette réflexion. Si ma suite m'avait suivi, elle aurait pu voir mon... étourderie, tandis qu'en me précédant, elle ne s'est aperçue de rien.
ÉLOI. - Vous êtes la logique même, Sire.
DAGOBERT. - Pas de flatterie, Éloi, pas de flatterie ! Songe plutôt à introduire ici mes deux filles à qui je veux parler avant de les livrer à leurs prétendus.
SCÈNE III
DAGOBERT, ÉLOI, INÈS Inès ÉLOI, introduisant Inès. - Son Altesse la princesse Inès.
INÈS, entrant. - Il n'y a pas un peu de musique pour mon entrée ?
DAGOBERT. - Non, ma fille, aujourd'hui jeudi tous mes musiciens ont congé et mon phonographe est cassé. D'ailleurs, tu ne vas pas danser, n'est-ce pas ?
INÈS. - Hé ! hé ! Ce n'est pas l'envie qui m'en manque.
DAGOBERT. - Je comprends cela, tu vas te marier.
INÈS. - Oh ! ce n'est pas encore fait ! Parce que s'il ne me plaît point...
DAGOBERT. - Ah ! non, par exemple, je t'ai trouvé un mari de choix, un grand homme, il ne manquerait plus que tu le refusasses. Songe que les grands hommes sont rares. Du reste, tu vas le voir.
INÈS. - Eh bien, mon père, s'il me plaît, je vous obéirai.
DAGOBERT. - S'il me plaît est de trop. Faites entrer la victime.
ÉLOI. - Pardon, Sire, vous vous trompez. Il s'agit du prétendu.
DAGOBERT. - Eh bien oui ! Qu'ai-je donc dit ?
ÉLOI. - Vous avez dit : la victime.
DAGOBERT. - C'est un lapsus. Je me croyais à mon tribunal. Après tout, si c'est une victime, ma fille est un gentil bourreau.
INÈS. - Merci, papa !
DAGOBERT. - Allons, un peu de tenue, ma fille, et placez-vous à ma droite. (Inès se place à la droite de son père.)
SCÈNE IV
DAGOBERT, INÈS, ÉLOI, rentrant avec le Sire de Perchelongue. Perchelongue ÉLOI, annonçant. - Le Sire de Perchelongue !
INÈS, à part. - Oh ! qu'il est grand !
DAGOBERT. - Tu vois que je ne t'ai pas menti.
INÈS. - Quand je voudrai lui donner le bras, je n'y arriverai jamais, il me faudra une échelle.