Liseur de journal
LE LISEUR DE JOURNAL
C'est un député nouveau
Qui, maladroitement, les a jetés dans l'eau
Au sujet des boissons...
1er BOURGEOIS
Le mouillage sans doute ?
2ème BOURGEOIS
Ah ! le mouillage ! Avec le prix que le vin coûte !
LE LISEUR DE JOURNAL
Mais, Monsieur, il faut bien que les marchands de vins
Mouillent, nous n'avons plus maintenant de raisins.
Liseur, mécanisme
BOURGEOIS
Soit ! Nos législateurs pourront dire qu'en France Ce sont eux qui nous ont ramené l'abondance !
NARRATEUR
Ces trois bourgeois ne font aucun mal, sûrement ;
Mais ils sont trois ; alors, c'est un rassemblement ;
Et tout rassemblement au bon ordre est contraire. Soudain, voici venir monsieur le commissaire :
Commissaire
LE COMMISSAIRE, entrant
Messieurs, dispersez-vous, je vous prie !
(Il attend).
NARRATEUR
Mais, comme on parle haut, personne ne l'entend.
LE COMMISSAIRE
Dispersez-vous, Messieurs, vous encombrez la place.
2ème BOURGEOIS
Mais la rue est à nous !
LE COMMISSAIRE
Messieurs, pas de menace,
J'ai des ordres. Si vous ne vous dispersez pas,
Je vais aller quérir la force de ce pas.
Commissaire, mécanisme
(Il sort).
NARRATEUR
Il sort et va chercher les agents de police.
Ainsi, les bons sergots vont entrer dans la lice,
Arrêtant, bousculant, frappant même au besoin,
Avec des coups de pied, avec des coups de poings,
Esclaves, en un mot, d'une sotte consigne
Qui fait que le plus vil ou bien que le plus digne,
Sans explication aucune maltraité,
Se rebiffe devant cette brutalité
Et, dans l'agent légal, ne voyant plus qu'un homme,
Le bat pour éviter que l'autre ne l'assomme.
Il paraît qu'on ne peut pas faire guère autrement ;
C'est ce que dit du moins chaque Gouvernement.
Voici le Brigadier, suivi de sa brigade.
Il s'avance aussitôt et, d'un air de bravade,
Dit :
LE BRIGADIER
Circulez, Messieurs, ou je vous mets dedans !
Brigade
NARRATEUR
Les deux bourgeois, qui sont surtout des gens prudents,
S'en vont, sans toutefois cesser leur bavardage ;
Puis un autre, l'homme au journal, est aussi sage.
Alors le brigadier, qui voit qu'on obéit,
Se vexe ; à tout force, il lui faut un délit.
Sur le dernier bourgeois, il lance sa brigade.
(La brigade sort).
BRIGADIER
Enlevez-le !
arrestation
Arrestation, mécanisme
NARRATEUR
dit-il. Bientôt, le camarade
Est enlevé par un des vigoureux sergents.
Puis, s'adressant ensuite à ses braves sergents :
LE BRIGADIER
Très bien, Messieurs, voici la place nettoyée, Bravo, vous avez bien gagné votre journée !
Je vais faire un rapport sur ce soulèvement,
Ça pourra me servir pour mon avancement.
Bernard ! Pitou ! venez ! Promenez-vous ensemble ; Que nul, entendez-vous, ici ne se rassemble !
(Il sort).
PITOU
Il suffit, brigadier. (à Bernard) Dites-moi donc, ce soir,
Si ça vous dit ?... Mais sans façon, venez nous voir,
Et dînez avec nous. Cuisine de ménage.
Je vous ferai goûter de mon fameux potage.
BERNARD
Ça n'est pas de refus.
(Ils sortent).
NARRATEUR
L'émeute, en ce moment,
Est calmée. On a pris un mauvais garnement
Ou deux, quelques badauds et quelques imbéciles
Parce qu'ils se tenaient tout bonnement tranquilles.
Le pouvoir a montré qu'il était vigoureux,
Ce qui fait que l'on s'est trouvé vraiment heureux
Quand les Ministres, c'est ce que dit la feuille,
On bien voulu, chacun, garder leur portefeuille.
De ce récit, Rouquin fait la moralité :
passants
passants mécanisme
TATAVE
Où donc est l'Asticot ?
LE ROUQUIN
Il vient d'être arrêté !
RIDEAU