THÉÂTRE D'OMBRES ET DE SILHOUETTES

SCÈNE XV

LA FÉE, CENDRILLON.

fée en théâtre d`ombres ombres chinoises silhouettes marionnettes
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LA FÉE (apparaît du côté du feu). - Me voilà, Cendrillon, que me veux-tu ?

CENDRILLON (reculant de surprise). - Moi ? rien, madame, c' n'est pas vous que je demandais... (à part). Oh ! la belle personne !

LA FÉE. - N'as-tu pas appelé Minette ?

CENDRILLON. - C'est vrai, mais ce n'est pas vous. C'est la chatte.

LA FÉE. - Eh bien ! C'est moi.

CENDRILLON. - Vous voulez rire sans doute.

LA FÉE. - Non, te dis-je, cette Minette, qui ce matin a tiré les marrons du feu, qui a joué tant de tours à ton beau-père pour le punir de te méconnaître, cette Minette qu'il poursuivait l'épée à la main, à qui tu as sauvé la vie à l'aide de ton panier ; cette Minette enfin que tu appelles maintenant, c'est moi.

CENDRILLON. - Par exemple, je vous aurais bien rencontrée vingt fois sans vous reconnaître.

LA FÉE (souriant). - Je le crois aisément.

CENDRILLON. - Mais vous êtes donc sorcière ?

LA FÉE. - Je suis fée.

CENDRILLON. - Vous.

LA FÉE. - Et de plus, ta marraine ; ce que tu as fait ce matin pour moi, t'a assuré ma protection.

CENDRILLON (sautant de joie). - Ah ! comme mes sœurs vont être surprises.

LA FÉE. - Tes sœurs !... Je me réserve de les punir au bal de ce soir.

CENDRILLON. - Pas trop fort, n'est-ce pas ? Car au fond elles ne sont peut-être pas méchantes.

LA FÉE. - Elle les défend ! excellent petit cœur. Mais je sais tout : l'autre soir dans le grenier ne t'ont-elles pas chassée et ne t'ont elles pas enfermée ?

CENDRILLON. - Je m'en souviens trop pour le nier ; mais comment dans ce grenier noir avez-vous pu voir tout cela ?

LA FÉE. - Je rôdais, comme font les chats, le long de la gouttière.

CENDRILLON. - Est-il possible ?... plus je vous regarde, plus ça me parait drôle, que cette petite Minette soit une fée.

LA FÉE. - C'est pourtant vrai, et quand tu voudras, je te donnerai le pouvoir de te transformer à volonté.

CENDRILLON. - De me transformer ?


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LA FÉE. - Oui, de changer, quand tu voudras, de figure et d'habits.

CENDRILLON. - Et on ne me reconnaîtra pas ?

LA FÉE. - Pas même ton père, ni tes sœurs.

CENDRILLON. - Ainsi quand je m'ennuierai d'être femme, je pourrai devenir homme ?

LA FÉE. - Tu n'auras qu'à dire.

CENDRILLON. - Et d'homme, redevenir femme ?

LA FÉE. - Tu n'auras qu'à parler, d'un seul coup de baguette, cela sera fait.

CENDRILLON. - Oh ! que c'est commode, une baguette comme ça (on frappe à la porte). Pardon, ma marraine, on frappe.

LA FÉE. - Va ouvrir. (Cendrillon se retourne et sort par la porte).


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SCÈNE XVI
 

LA FÉE. - L'aimable enfant ! comme elle a été surprise de ma métamorphose, et comme jeme sais gré de l'avoir adoptée. J'entends venir quelqu'un. (Elle disparaît).


SCÈNE XVII

CENDRILLON, MIRLIFLOR.

prince en théâtre d`ombres ombres chinoises silhouettes marionnettes
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CENDRILLON (elle entre par la porte à reculons). - Donnez-vous la peine d'entrer par ici, monsieur.

MIRLIFLOR (il entre par la porte). - Me voici donc dans le château de monsieur de la Canardière.

CENDRILLON. - Oui, monsieur, si monsieur veut me dire son nom, je vais l'annoncer.

MIRLIFLOR. - Le prince Mirliflor, seigneur du village voisin.

CENDRILLON. - Je vais avertir mon père.


MIRLIFLOR. - Vous êtes donc une des filles de la maison ?

CENDRILLON. - C'est si on veut : je la suis et je ne la suis pas.

MIRLIFLOR. - Comment vous n'êtes pas la fille de votre père, mais ce que vous me dites là me parait amphibologique, j'ose même dire amphigourique.

CENDRILLON. - C'est pour vous dire que monsieur de la Canardière ne m'a jamais traitée comme sa fille.

MIRLIFLOR. - Et quel est votre pays, votre âge, votre nom ?

CENDRILLON (elle chante). -
Air : Lise chantait dans la prairie.
Je suis d'un village de Flandres,
Je compte quinze ans et trois mois,
Je vis, un mercredi des cendres,
Le jour pour la première fois ;
Ma place ici n'est pas trop belle
Assise devant un tison.
Je reste sur mon escabelle ;
Voilà pourquoi l'on m'appelle
La petite Cendrillon.

MIRLIFLOR. - Et quelle est votre occupation ?

CENDRILLON. -
Je fais la cuisine, je lave.
Et tous les jours sur l'escalier.
Je descends le vin à la cave.
Je monte le bois au grenier.
De travail, ici l'on m'assomme
Sans égard pour mon cotillon.
Que j' sois lasse ou non, c'est tout comme. 
L'on traite enfin comme un bonne 
La petite Cendrillon.

MIRLIFLOR. - Et vos sœurs que font-elles ?

CENDRILLON. -
Mes sœurs fréquentent le grand monde ;
Elles courent spectacle et bal
Et chez elles, l'argent abonde.
Tandis que moi, j'ai tout le mal ;
Ces demoiselles ont l' privilège
De fair' nuit et jour carillon,
De m' gronder, de m' battre, que sais-je ? 
Mais je sais bien, qui protège 
La petite Cendrillon. (bis)
     Ah, mon Dieu ! j'ai oublié de vous annoncer, j'y cours (elle se retourne et sort du côté du feu).


SCÈNE XVIII

MONSIEUR DE LA CANARDIÈRE, MIRLIFLOR.


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