SCÈNE III.
Ali Baba, Antonio.
ALI BABA. - Antonio, n'a-t-on pas frappé ?
ANTONIO. - Oui, mon père, Morgiane est allée... La voici.
SCÈNE IV.
Les précédents, Morgiane.
MORGIANE, accourant. - Un marchand d'huile voudrait vous parler.
SCÈNE V.
Les précédents, le Capitaine, couvert simplement d'une blouse.
LE CAPITAINE. - Pardon, brave homme, si je viens vous interrompre, mais j'amène de bien loin l'huile que vous voyez... pour la vendre demain matin au marché, et, à l'heure qu'il est, je ne sais où aller loger. Si cela ne vous incommode point, faites-moi le plaisir de me recevoir chez vous pour y passer la nuit, je vous en aurai obligation.
ALI BABA. - Avec plaisir, soyez le bienvenu.
LE CAPITAINE, à part. - Il y consent; quel bonheur !
MORGlANE, à part. - Cet homme-là n'a pas un maintien ordinaire.
ALI BABA. - Morgiane, conduis monsieur dans ma chambre et prépare- lui tout ce dont il aura besoin.
(Morgiane sort).
LE CAPITAINE, - Je vais vous causer bien de l'embarras,
ALI BABA. - Du tout, c’est un plaisir pour moi quand je peux rendre service.
LE CAPITAINE. - Enseignez-moi, je vous prie, l'endroit où je pourrai mettre mes mulets.
ALI BABA. - Mes esclaves les arrangeront, soyez sans inquiétude ; on aura soin de leur donner ce qu'il leur faut.
LE CAPITAINE. - Je n'en doute pas, mais je ne veux pas abuser de votre complaisance.
ALI BABA. - Allons donc ! Vous plaisantez, je crois...
LE CAPITAINE. - Croyez-moi, vous m'obligerez.
ALI BABA. - Puisque vous le voulez, mon esclave vous y conduira.
SCÈNE VI.
Il fait presque nuit.
Les précédents, Morgiane.
MORGIANE. - Quand monsieur voudra, il est servi.
ALI BABA. - Morgiane, va montrer l'écurie à monsieur.
LE CAPITAINE, à Ali Baba que se dispose à s'en aller. - Au revoir, brave homme.
ALI BABA. - Je vous souhaite une bonne nuit. (Il sort).
SCÈNE VII.
Les précédents, excepté Ali Baba.
LE CAPITAINE, bas. - Je ne t'en souhaite pas une seconde.
ANTONIO, qui a entendu, à part. - Je te surveillerai, toi.
(Morgiane et le capitaine sortent).
SCÈNE VIII.
Antonio et Cocasko.
Antonio tourne le dos à Cocasko ; il paraît plongé dans une profonde réflexion.
COCASKO. - Eh bien ! que dites-vous de cela, monsieur Antonio ? Voilà que l'on prend votre papa pour un aubergiste.
ANTONIO, sans entendre Cocasko. - Que peut être cet homme ?
COCASKO. - À quoi réfléchit-il donc ?
ANTONIO, de même. - Que prétend-il faire ? Il est seul, et il a menacé mon père.
COCASKO. - Son air inquiet... me... m'inquiète aussi... moi.. Est-ce qu'il rêve ?
ANTONIO. - L'air avec lequel il a prononcé ces paroles : « Je ne t'en souhaite pas une seconde », ça me fait croire qu'il ne peut être qu'un coquin, car mon père n'a jamais fait de mal à personne ; et c’est injustement que cet homme attente à sa vie. Ô monstre !
(Il recule sur Cocasko).
COCASKO. - Moi, un monstre ? C’est un peu fort, ça ! Est-ce que vous êtes fou ?
ANTONIO, continuant. - Ne prétends point réussir dans ton dessein criminel.
COCASKO, criant fort. - Je vous dis que je n'ai pas de dessein...
ANTONIO. - Veux-tu te taire, bavard... J'entends du bruit... Tiens, laisse-moi seul.
COCASKO. - Ah ! oui, j'aime mieux ça, moi. (Il sort).
pot d'huile
SCÈNE IX.
Antonio, seul un instant.
ANTONIO. - Le voici qui s'approche, cachons-nous de écoutons.
SCÈNE X.
Antonio derrière une coulisse ; le capitaine.
LE CAPITAINE, arrivant mystérieusement. - Je crains cette maudite esclave ; il me semble qu'elle a des soupçons.
ANTONIO, paraissant un peu. - Et moi aussi.
LE CAPITAINE. - J'avais de la peine à m'en débarrasser. Elle n’est pas du tout maladroite, elle voulait à toute force mettre mes mulets à l'écurie ; ce que j'étais bien loin de lui accorder. Enfin, elle m'a fait le plaisir de s'en aller. Quant à l'homme qui a eu la hardiesse de nous enlever les quatre quartiers du cadavre...
ANTONIO, se montrant. - Qu'entends-je ?
LE CAPITAINE. - Il est à croire que c’est le maître ; n'importe, ce ne peut être que quelqu'un de la maison, et pour qu'il ne puisse pas m'échapper, je vais, par le moyen d'un baril de poudre, faire sauter tout le monde. Tous mes camarades cachés dans les tonneaux, la douzième heure de la nuit pour signal... Tout est bien disposé, allons nous coucher jusqu’à ce temps.
(Il entre dans le vieux logis).
SCÈNE XI.
Antonio, sortant de sa cachette.
ANTONIO. - Oh ! grand Dieu ! n'est-ce pas un songe ? ai-je bien entendu ?... « À minuit, dit-il, je ferai fauter la maison... » Ô mon père !... Ô mes dignes bienfaiteurs !... Quel horrible complot ! ... Quelqu'un vient... C’est toi, Morgiane ?
SCENE XII.
Antonio, Morgiane.
MORGIANE. - Paix !
ANTONIO. - Nous sommes perdus !...
MORGIANE. - Pas encore.
ANTONIO. - Le marchand d'huile n'est qu'un coquin.
MORGIANE. - Je le sais.
ANTONIO. - Les barils contiennent sa suite.
MORGIANE. - C’est vrai.
ANTONIO. - Ils mettront le feu à la maison.
MORGIANE. - Ils ne pourront pas.
ANTONIO. - Ah ! si tu savais...
MORGIANE. - Je sais tout.